LES AMAZONES

Ô ma bien-aimée mémé !
Quand autrefois je t’ai dit dans une lettre de moi, parce que trop inspiré par le Démon de Socrate, que Dieu lui-même est la mort (parce que pourquoi Dieu ne peut pas être la mort, quand il est la vie ?), tu m’as envoyé une réponse express approbative, qui portait comme l’en-tête l'empreinte rose de ton baiser.

Oh ! comme tu m’aimais, mémé, à la façon d’une vielle bimbo qui adore son gigolo ! Mais hélas ! tu m’aurais aimé, mémé, parce que tu n’avais plus peur du monstre létal, la mort qui, si elle eût été Dieu lui-même, n’eût plus broyé ta tête ni avec son lourd gourdin barbelé ni avec sa faux moissonneuse affûtée !

Mais tu me traites aujourd’hui de ‘’filousophe’’ comme Victor Hugo traita M. Thénardier de filousophe, car, dans le contexte de l’émancipation de la femme, le sens de ces mots t’échappe : amazonisme revanchard et amazonomachie ?

Diable ! à quoi bon, en droit de réponse, de mettre en cause un esprit de féminisme immortel, datant depuis les années de rumba, de cha-cha-cha, de salsa, ces années où, vraie pasionaria, en faisant le zigoto devant le grand-papa, il réussit à le séduire et le kidnapper !

Et à quoi bon, ô mémé ! en droit de réponse, de riposter, quand tu me traites d’un phallocrate, d’un misogyne, d’un machiste, d’un antiféministe, sans me comprendre un instant, sans me demander d’explication, ô ma douce babouchka !

Il est vrai que quelques croyances mythologiques de même que certains textes des religions monothéistes ont caricaturé votre image de femme, en disant tantôt que vous êtes de Pandore, qui a ouvert le vase contenant les maux et les misères, en disant tantôt que vous êtes d’Eve, qui est le Péché originel lui-même.

Or moi je reviens, non moins féministe, redorer votre image diabolisée avec ces deux mots : amazonisme revanchard et l’amazonomachie. Et tu oses me ridiculiser, au lieu de me béatifier et gratifier ?

Ton éternel retour, ô mon Amazone, avec tes guerrières, ne me reflète pas le retour des Amazones vierges du Dahomey, sous le règne du roi Agadja dans la cavalerie de Ghézo, ou celle de ces Linguères, au Sénégal, sous le royaume de Cayor, ou celle de ces jeunes filles zoulous, ou même celle du Roi des rois régnant sur Cyrénaïque et Tripolitaine ; elle n’est pas non plus, pour moi, mythologique, mais réelle, quoique tragique à faire peur à certains antiféministes antipathiques.

Ô mon Amazone ! je vois ton éternel retour, mais autrement, ton éternel retour avec tes guerrières, qui régneront plus tard dans les quatre coins du monde !

Je me vois cependant avec mes hommes dans une amazonomachie, où toi, ma guerrière, avec tes guerrières, comme dans une corrida, munies d’une muleta, vous nous combattez à la façon d’Athéna, et sur tous les terrains : femme professeur de chaire, femme ingénieur, femme docteur, femme pilote de ligne, femme astronaute, femme philosophe, femme directrice d'entreprisee, femme Présidente de la République, femme tout terrain, femme qui ne veut plus qu’on appelle avec périphrase qui l’abaisserait à être Madame le Ministre, Madame le docteur… !

Je ne vous appelle pas Les Amazones, parce que vous vous coupez les seins droits pour faciliter le tir à l’arc, parce que vos attributs sont alors un bouclier léger en forme de demi-lune, une lance, un arc et des flèches propres aux cavaliers de steppes ; parce que votre signal avant la bataille est donné par un sistre, une sorte de grelot, plus souvent en bronze ;

Je ne vous appelle pas les Amazones, parce que vous nous rendez aveugles, ou boiteux, pour ensuite nous utiliser comme des serviteurs, comme des baby-sitters,

Je vous appelle les Amazone, parce que vous prouvez, après des siècles d’humiliation, dans votre émancipation, des efforts intellectuels sur tous les terrains de bien-être social, et sans émulation !

Même si, Ô ma bien-aimé mémé, tous ces hommes, tous ces héros ont eu affaire à vous, ont eu chacun sa reine à aimer, et, finalement, à tuer : Achille à affronter Penthésilée venue secourir les troyens, et après s’être épris d’elle, ensuite la tuer ; Héraclès de s’être emparé de la ceinture d’Hippolyte et finir par la massacrer avec ses compagnes,

Même si tous ces fanatiques religieux  ou traditionalistes fanatiques cherchent à vous assujettir sous des jougs, ô ma berceuse Miryna ! je ne te tuerai pas, je ne te ridiculiserai pas ! Je serais ton Alexandre le Grand !

® Charles Coulibaly Nountché
© Les Neuf Muses


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