LES PREMIÈRES AMOURS

Quand j’étais petit moi et mes amis, Poisson Madou, parce que sa mère vendait du poisson fumé, Tiguèdèguè Seydou, parce que sa mère vendait de la pâte d’arachide, 
et tous les autres qu’on appelait à la façon des français qui n’auront pas tort alors d’appeler celui-là Fernand la Porte, celui-là Charles le Charpentier, celle-là Chantal Dubois...

Quand j’étais petit, la nuit, le village tout nu, moi et mes amis jouions, souvent jusqu’à minuit, au clair de lune, et guettions nos petites muses aux beautés virginales et aux yeux de cristal,
qui jouaient à la marelle, qui chantaient et dansaient comme ces sœurs religieuses à la chapelle.

La voûte azurée était ensoleillée d’un lustre qui luisait sphérique, et éclairait de sa lueur notre sphère.
L’aiguille qui tombait sur le sol feuille-morte, se retrouvait même dans les fondrières.

Voici nos grands frères, qui ont cessé de se promener torse nu, de fouler les pierres des macadams pieds nus, de jouer au cache-cache jusqu’à minuit,
jouer depuis au damier à côté de l’apatam qui sert aux jeux pendant la journée.
Voici nos grandes sœurs aux tétons prêts à la cueillette, aux chairs charnelles, qui ne font plus la prude, devant leur capital :
orange qu’elles épluchent, mandarines qu’elles entassent sur ces tables montées de pièces de bois d’ébène et de bambou de Chine. Microcrédit de plaisir, de loisirs nocturnes !

Bientôt elles lèveront camp, non par peur d’une contravention, mais parce que leurs clients-amants rôdent cependant tout autour d’elles, bouillonnant comme Pan. 
Bientôt ils disparaitront à jamais de nos yeux, pour jouir comme les adultères dans des alcôves, de leurs amours adultes ;
et nous, de nos libres-arbitres, nous pourrons choisir, et nous pourrons nous dire : « Ne touche pas à celle-là, c’est celle-là que j’aimais, c’est celle-là que j’aimerais toucher les derrières… ! ».

Quand tout sera libre dans l’agora, quand les jouvenceaux enlèveront les jouvencelles, et que je demeurerai le seul torero dans la corrida, moi et mes amis, vos jules, ô muses ! nous vous partagerons,
et, sémillants étalons, nous effleurerons à la hussarde vos fesses crues, vos fesses saintes-nitouche, vos fesses ceintes de ces bayas de perles rares,
pour nous en jouir et ensuite vous fuir, vous qui, amazones agiles et dociles, nous poursuivrez jusque devant les buissons.

Quand, femmes mûres, plus tard, vous débobinerez les vielles bandes de vos cerveaux, j’aimerais, ô muses ! que nous resterions des dieux d’amours immortels dans vos mémoires,
de même que vous, des déesses souveraines de nos destins, jusqu’à l’éternité !

© CC Nountché
© Les Neuf Muses

PS: POÉSIE ET PROSE Tome I : Les Neuf Muses, a paru aux éditions Mon Petit Éditeur. Vous pouvez vous en procurer un ou plusieurs sur Amazon, sur Fnac, ou via ce lien de l'éditeur: https://www.monpetitediteur.com
Peinture: http://www.bimago.fr/tableaux/tableau-africain-et-ethnique.html

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